Depuis la crise sanitaire et les confinements qu’elle a engendrés, le télésoin (ou la téléconsultation) s’est imposé comme une alternative aux soins médicaux traditionnels en présentiel.
Encadré par la loi depuis 2020 ou 2021 selon les professions, le télésoin permet en effet à tout praticien de prendre en charge et de suivre un patient à distance via le système de la vidéotransmission, plus communément appelé visio.
Les futurs professionnels libéraux doivent aujourd’hui se poser la question de l’implémenter ou non dans leur pratique du quotidien.
Alors comment mettre en place cette pratique de e-santé et l’encadrer pour qu’elle soit autant fructueuse pour le patient comme pour le praticien ?
Le télésoin pour toutes les professions de la filière rééducation
A priori, toutes les professions libérales du domaine paramédical peuvent avoir recours au télésoin. Avant d’y avoir recours, le professionnel doit vérifier si sa méthode est éligible avec la pratique d’une consultation à distance.
Deux cas de figure sont envisageables :
- Pour les professions qui nécessitent de la manipulation comme les masseurs-kinésithérapeutes ou les ostéopathes, le télésoin permet de réaliser des entretiens préalables avant une prise en charge en présentiel par exemple, ou éventuellement de réaliser quelques exercices simples à distance en complément d’un suivi en présentiel.
- Pour les professions qui ne nécessitent pas forcément de manipulation, comme les ergothérapeutes, les psychologues ou neuropsychologues, et les psychomotriciens, il est parfaitement possible d’implémenter le télésoin sur une longue durée avec son patient.
Christel Ortis, ergothérapeute, s’est laissée convaincre par le télésoin qu’elle pratique exclusivement aujourd’hui : “pendant le confinement j’étais bénévole dans une association d’enfants handicapés où j’organisais des ateliers. Une fois l’expérience terminée, j’ai deux familles qui m’ont contactée pour un suivi en dehors du cadre de l’association. J’ai commencé ces deux suivis en 100 % à distance avec ces deux patients que je ne connaissais pas. Ça a super bien marché ! Depuis, je ne pratique que le télésoin avec ma patientèle.”
Certaines situations cliniques demandent néanmoins une rencontre physique : c’est ce que rajoute Juliette Akkari, orthophoniste. Les orthophonistes ne peuvent effectuer que 20% de leur activité conventionnée par an en télésoin (Arrêté du 13 avril 2021).
Il est en effet primordial de prendre en compte certains facteurs physiques, psychologiques, socio-professionnels et familiaux des patients avant de pratiquer le télésoin.
⚠️Dans tous les cas, le télésoin requiert pour le praticien d’être autant exigeant – voir plus – qu’en présentiel.
Les avantages du télésoin (et ses limites)
Le télésoin permet aux familles qui vivent dans des zones rurales et/ou déserts médicaux d’éviter les longs trajets pour se rendre à leur rendez-vous. Christel Ortis a fait ce constat : “pour une séance de 45 minutes, l’enfant est parfois mobilisé 2h30 sur son mercredi après-midi avec la route, l’attente et la séance. C’est du temps en moins pour faire une activité.”
Christel Ortis explique également que le télésoin lui a permis de réduire ses annulations à 75 % : “j’avais une moyenne de 4 annulations par semaine, soit 16 par mois. Le télésoin me permet d’éviter cette perte de créneau et d’honoraire : les patients malades peuvent quand même suivre leur séance depuis chez eux – dans la limite de leurs capacités – et les patients qui vivent loin et ont un imprévu peuvent également assister aux séances plus facilement via leur ordinateur. Je suis passée de 4 séances annulées en moyenne à une seule”.
Au-delà, la pratique du télésoin permet de rendre accessible le soin dans les déserts médicaux : “c’est une pratique de l’avenir, même si on ne peut pas tout faire en télésoin, il est forcément voué à se développer et à se structurer encore et encore”.
Les limites peuvent se dessiner en fonction de la patientèle : “pour un enfant qui possède un trouble de l’attention avec/sans hyperactivité, le suivi en télésoin peut être compliqué” explique Christel. De même, une mauvaise connexion internet peut rendre très difficile la consultation en visio : “j’ai parfois des décalages avec mes patients, et s’ils sont trop importants, nous pouvons couper la caméra”. Alexandre Prouteau rajoute que la réussite du télésoin dépend de chaque patient et qui peut manquer de structure.
Les bonnes pratiques du télésoin
S’équiper correctement
La base de votre équipement pour le télésoin est la suivante :
- Le matériel : ordinateur en bon état avec une webcam de qualité, connexion Wi-Fi ou 4G/5G performante, éventuellement un casque audio.
- Le logiciel : Jitsi
- L’environnement : assurez-vous de réaliser la séance dans un endroit calme et plutôt neutre. “Il est important que le patient soit installé à une table ou un bureau avec une hauteur d’assise adaptée, au calme et avec une luminosité adaptée” précise Christel Ortis.
Votre patient doit également avoir l’équipement adapté pour que la séance en téléconsultation se déroule sans accroc. Alexandre Prouteau, psychomotricien, explique qu’il utilise le télésoin pour 50 % de sa patientèle, et de son expérience, la séance est optimale si le patient utilise deux caméras pour avoir une vision globale du visage et du corps.
Christel Ortis, demande quant à elle à ses patients de télécharger TeamViewer qui lui permet de “prendre la main” sur l’ordinateur de son patient et de le dépanner si besoin. Cela permet également de transmettre des documents facilement : “quand je travaille avec des enfants qui apprennent à utiliser un clavier, c’est beaucoup plus pratique.”
Les plateformes de télésoin agréées, sont répertoriées ici Téléconsultation et Covid-19 : qui peut pratiquer à distance et comment ? – Ministère de la Santé et de la Prévention (sante.gouv.fr)
Comment facturer en télésoin ?
- Pour les professionnels non-conventionnés, la facturation se fait de la même façon qu’en présentiel.
- Pour les professionnels conventionnés comme les orthophonistes, la situation diffère légèrement du fait de la non présentation de la carte vitale. L’orthophoniste doit donc facturer en mode SESAM sans vitale. L’orthophoniste peut aussi choisir de facturer en dégradé. Notez aussi que les actes sont facturés avec le code TMO, qui se substitue à AMO. Par exemple pour une rééducation « AMO 15.7 », on facture « TMO 15.7 ».
⚠️Pour les patients, le remboursement en télésoin se fait de la même façon qu’en présentiel.
Bien préparer la première séance
Pour Alexandre Prouteau (psychomotricien) et Laurent Auclair (neuropsychologue), le télésoin est un réel avantage seulement si un premier bilan est réalisé en présentiel. En fait, cela dépend réellement de la pratique : “j’ai un meilleur contrôle si je décide de suivre un patient ou pas après un premier rendez-vous en présentiel” explique Laurent Auclair. Attention, pour les orthophonistes, le bilan initial doit obligatoirement se faire en présentiel. Le.la patient.e doit avoir bénéficié d’au moins un bilan ou une séance avec l’orthophoniste qui le suivra en télésoin.
Bien sûr, certains praticiens préfèrent débuter directement en télésoin si c’est le souhait du patient. En tant que futur professionnel, libre à vous de déterminer avec quelle première approche vous êtes le plus à l’aise.
⚠️ Si la première séance se fait en visio, il faut penser à vérifier l’identité du patient (nom, coordonnées, adresse mail…) et à récupérer son numéro de téléphone en cas d’incident technique pour pouvoir lui téléphoner si besoin.
Faire signer une charte d’encadrement du télésoin
Avant de commencer un suivi en télésoin partiel ou total, vous pouvez faire signer à votre patient (ou à ses parents s’il est mineur) une charte de télésoin. En plus de recueillir le consentement du patient, cette dernière permet d’afficher en noir sur blanc les modalités de pratique du télésoin comme :
- la présence obligatoire ou non des parents pour les séances avec des enfants ;
- la possibilité pour le praticien d’enregistrer la consultation et/ou de la filmer pour garder une trace ;
- demander d’être dans “un espace de travail cohérent” : une pièce fermée, calme, sans mouvement autour ;
- expliquer la façon dont sont traitées et protégés les données échanges en ligne ;
- les modalités de paiement.
Lorsqu’il s’agit de télésoin avec des enfants, Christel Ortis insiste sur la signature d’une charte : “Il est très important de borner les choses, de faire signer des papiers, et d’expliquer que la séance en présentiel et en distanciel ce n’est pas toujours la même chose.Je requiers également la présence d’un parent » pour l’intendance et la sécurité.”
Le compte rendu après une séance de télésoin
Vous pourrez enregistrer un rapport de votre séance dans le dossier médical partagé du patient (DMP) ou dans votre dossier patient avec :
- l’heure du soin ;
- la date du soin ;
- le détail de la séance comme les actes réalisés ;
- les prescriptions effectuées (si éligible) ;
- les éventuels incidents rencontrés.
Cet enregistrement n’est pas systématiquement obligatoire mais permet toutefois d’avoir une trace du suivi. Il peut être transmis au patient ou à un autre professionnel de santé impliqué dans le parcours de soin du patient.
Ne pas confondre télésoin et téléexpertise
La téléexpertise est un échange entre deux professionnels ne nécessitant pas obligatoirement la présence du patient. Celui-ci doit cependant donner son accord après avoir été informé des conditions de réalisation de la téléexpertise.
Votre médecin contacte un de ses confrères via une messagerie sécurisée afin de recueillir son avis sur une pathologie. Puis, le spécialiste transmet un compte-rendu au professionnel de santé qui l’a sollicité et indique ainsi au médecin si le cas du patient nécessite une prise en charge en urgence ou pas. Vous pourrez consulter cet avis sur la plateforme Mon espace santé.
Jusqu’au 1er avril 2022, le dispositif téléexpertise était réservé aux patients atteints d’une affection de longue durée (ALD) ou d’une maladie rare, aux personnes vivant en EHPAD ou encore aux détenus.
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